Les femmes manquantes
Définition
La notion de « femmes manquantes » a été inventée par l’économiste indien Amartya Sen, dans un article paru en 1992, pour désigner le déficit démographique existant entre les hommes et les femmes en Asie du Sud. Cette disparité est due à des avortements sélectifs, à des infanticides, des abandons et des mauvais traitements, lorsque l’enfant né ou à naître est une fille. [1]
Ces pratiques sont ancrées au nom de préjugés liés à l’honneur, de croyances religieuses et de calculs économiques qui font des garçons un investissement pour l’avenir et des filles une charge. [2] Pour cet ensemble de raisons, il paraît plus avantageux aux familles les plus démunies d’avoir des garçons, et certaines d’entre elles vont jusqu’à se séparer de leurs filles. [3]
Principaux pays concernés
Le phénomène des femmes manquantes est particulièrement développé en Asie du Sud, en Chine et en Inde. Selon les estimations de l’ONG Visions du Monde, il y aurait 39 millions de femmes manquantes en Inde et ce chiffre attendrait 163 millions pour l’ensemble de l’Asie. En Chine, la politique de l’enfant unique a longtemps accentué ce phénomène. [3]
Initiatives pour limiter le phénomène
En 1994, l’Inde a adopté une législation interdisant la pratique des échographies uniquement pour connaître le sexe du futur enfant et a rendu illégal l’interruption médicale de grossesse basée sur le sexe. Malgré l’adoption de cette loi, ces pratiques sont toujours d’actualité, le pays compte un grand nombre de cliniques qui ne respectent pas la loi de 1994. En 2006, un médecin et son assistant ont été condamnés à deux ans de prison pour avoir révélé le sexe d’un fœtus à une femme enceinte, première condamnation de ce type en Inde. [4]
Selon Amartya Sen, l’éducation et l’autonomisation économique des femmes contribuerait à la baisse du phénomène des femmes manquantes, par la réduction des violences faites aux filles et la baisse du taux de fécondité. Le Bangladesh a vu le taux de fécondité des femmes diminuer de 7 à 2,2 enfants par femme. En Inde, la démocratisation de l’éducation des filles a également permis une baisse significative du taux de fécondité des femmes. [5]
Références
- Amartya Sen, “Missing women. Social inequality outweighs women’s survival advantage in Asia and north Africa”, BMJ, volume 304, 7 mars 1992, (en anglais), http://www.bmj.com/content/bmj/304/6827/587.full.pdf
- Résumé de l’ouvrage « Quand les femmes auront disparu. L’élimination des filles en Inde et en Asie », de Bénédicte Manier, Éditions La Découverte, 2006, http://www.genreenaction.net/Quand-les-femmes-auront-disparu-L-elimination-des.html
- ONG Visions du monde, « Les femmes manquantes en Inde », http://www.visiondumonde.fr/actualites/news/les-femmes-manquantes-en-inde
- Olivia Marsaud, Les filles manquent à l’appel, RFI, 2006, http://www1.rfi.fr/actufr/articles/075/article_42801.asp
- Amartya Sen “India’s Women: The Mixed Truth”, The New York Review of Books, 10 octobre 2013, (en anglais), http://www.nybooks.com/articles/2013/10/10/indias-women-mixed-truth/
Liens externes
France Culture, « Les femmes manquantes d’Asie du Sud », 4 octobre 2013, http://www.franceculture.fr/emission-l-hebdo-des-idees-les-femmes-manquantes-d-asie-du-sud-2013-10-04
Naila Kabeer, « Le « déficit de filles » en Asie du Sud » (vidéo), Centre de recherches pour le développement international (CRDI), 2011, http://www.observaction.org/violences-de-genre/naila-kabeer-le-deficit-de-filles-en-asie-du-sud/