La pandémie liée à la Covid-19 constitue une menace sérieuse pour la réalisation des ODD liés au genre. Ses conséquences socio-économiques mettent en péril certaines des améliorations observées depuis 2015 en matière d’égalité hommes-femmes et d’autonomisation des femmes. Compte tenu de l’état d’avancement des ODD avant le déclenchement de la crise et de leurs liens les uns avec les autres, il est évident que les conséquences économiques et sociales de la pandémie vont exacerber les inégalités et les discriminations existantes à l’égard des femmes et des filles, en particulier des plus marginalisées. La crise d’Ébola (2014-2015) en Afrique de l’Ouest et l’épidémie de Zika (2015-2016) en Amérique latine ont révélé que les crises de santé publique peuvent mettre un frein aux politiques et aux réformes visant à transformer les relations entre les hommes et femmes. En effet, les crises privent les femmes de ressources nécessaires à leurs besoins tandis que ces mêmes crises accroissent les besoins auxquels font face femmes. Il est donc essentiel de prendre conscience de l’impact actuel du Covid-19 ainsi que de ses implications pour la réalisation des ODD si des mesures préventives ne sont pas prises.
Compte tenu des vastes et multiples implications de la crise du Covid-19, tous les ODD, et en particulier les objectifs et indicateurs liés au genre, sont susceptibles d’être touchés. Reconnaître cet impact est une première étape essentielle pour concevoir des politiques de relance socio-économiques qui aideront à atteindre les ODD et l’égalité des sexes. Bien qu’il ne s’agisse pas d’une liste exhaustive, si l’on considère le problème sous l’angle du genre, il est évident qu’au moins les ODD suivants souffriront de ralentissement, voire de recul :
ODD 8 – « Travail décent » : « Les femmes représentent environ deux tiers du personnel de santé dans le monde et […] environ 85 % des infirmières et des sages-femmes dans les 104 pays pour lesquels des données sont disponibles » (OCDE, 2020). Cette concentration sectorielle, ainsi que la surreprésentation des femmes dans certains secteurs tels que le commerce de détail et l’hôtellerie, signifie que les femmes sont exposées de manière disproportionnée à la Covid-19 au travail et sont plus touchées que les hommes par les mesures de confinement.
ODD 3 – « Bonne santé et bien-être » : En temps de crise sanitaire, les ressources allouées à la santé reproductive et sexuelle sont détournées et réorientées vers la réponse d’urgence. Comme constaté au cours de la crise d’Ebola en Afrique de l’Ouest en 2014-2015, cela a contribué à une augmentation de la mortalité maternelle dans les régions ayant de faibles capacités de soins de santé (Wenham, Smith et Morgan, 2020). Par exemple, en Sierra Leone, des études d’impact menées après la crise ont révélé une baisse drastique de l’utilisation des services de santé au cours de la crise, entraînant, selon les estimations les plus prudentes, 3 600 décès maternels, néonatals et mort-nés supplémentaires sur la période 2014-2015 (Sochas, Channon et Nam, 2017).
ODD 4 – « Une éducation de qualité » : La crise Ébola a également révélé une augmentation significative des grossesses adolescentes au cours de l’épidémie suite à la fermeture des écoles, se traduisant, en retour, par une augmentation du taux d’abandon scolaire – en particulier pour les mères adolescentes — au cours de la période post-crise (Bandiera et al., 2019). En parallèle, l’augmentation à venir de la charge de travail non rémunéré et des tâches domestiques qui pèse sur les épaules des femmes et des filles – en particulier les soins rendus aux malades – aura probablement des conséquences importantes sur les perspectives d’éducation des filles.
ODD 2 – « Faim Zéro » : Dans les pays où les normes sociales impliquent une préférence pour les garçons plutôt que pour les filles, la pandémie pourrait amplifier ces préférences de plusieurs façons. Par exemple, dans des contextes de ressources alimentaires limitées, les ménages où les normes sociales discriminatoires sont répandues pourraient être amenés à privilégier les garçons par rapport aux filles, ce qui aurait une incidence négative directe sur le deuxième objectif stratégique. De même, dans un contexte de ressources limitées, la préférence pourrait être accordée aux garçons par rapport aux filles en matière d’éducation et de santé (ODD 3 et 4).
ODD 1 – « Pas de pauvreté » et ODD 10 – « Inégalités réduites » : Étant donné que les conséquences économiques de l’épidémie – par exemple les licenciements, la perte de revenus, la précarité de l’emploi – pourraient davantage toucher les femmes, une augmentation des niveaux de pauvreté des femmes dans le monde est très probable.
Plus spécifiquement, la pandémie aura de graves conséquences pour la réalisation de l’ODD 5, « Parvenir à l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles ». Avant la crise, on estimait que 2,1 milliards de filles et de femmes vivaient dans des pays qui n’atteindraient pas les cibles liées à l’égalité entre les sexes d’ici 2030 (Equal Measures 2030, 2020). Alors que le rythme des progrès commence à ralentir, les pays développés et en développement vont avoir besoin de plus de temps ainsi que de mesures fortes afin d’atteindre les cibles liées à l’égalité entre les sexes. Les cibles suivantes de l’ODD 5 seront en particulier gravement touchées :
ODD 5.1 sur l’élimination de « toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et des filles » : D’après le SIGI (Social Institutions and Gender Index) de l’OCDE, de nombreuses nouvelles législations visant à renforcer l’égalité des sexes et à abolir les lois discriminatoires bénéficiaient d’engagements politiques croissants avant la crise (OCDE, 2019). Toutefois, la crise a paralysé la capacité de nombreux États à adopter à et mettre en œuvre de nouvelles lois.
ODD 5.2 sur l’élimination de « toutes les formes de violence faite aux femmes et aux filles » : Des données récentes révèlent que 18% des femmes dans le monde ont subi des violences physiques et/sexuelles de leur conjoint au cours des 12 derniers mois. De nouvelles données ajoutent que la violence domestique a augmenté au cours des mesures de confinement. Par exemple, la ligne d’assistance téléphonique nationale contre les violences domestiques du Royaume-Uni indique une augmentation de 25 % du nombre d’appels téléphoniques au cours de la première semaine de confinement et la multiplication par 1,5 des visites sur son site web (ONU Femmes, 2020).
ODD 5.3 sur l’élimination de « toutes les pratiques préjudiciables » : Avant la crise, les données suggéraient un déclin des mariages d’enfants en Asie du Sud et en Afrique subsaharienne (Centre de développement de l’OCDE, 2019). La pauvreté induite par la pandémie pourrait engendrer une augmentation des mariages précoces et forcés. Dans le même temps, dans les pays à faibles revenus, la crise sanitaire va gravement compromettre les capacités et les ressources financières des gouvernements, ce qui aura des répercussions sur les capacités législatives et d’application de la loi de ces pays. Par exemple, les poursuites engagées contre les auteurs de mutilations génitales féminines risquent de s’atténuer, alors même que cette pratique semble s’être accrue depuis le début de la pandémie.
ODD 5.4 sur la reconnaissance et le partage des travaux domestiques non rémunérés : Avant l’épidémie de Covid-19, les femmes effectuaient déjà 75 % du travail domestiques non rémunéré dans le monde (Centre de développement de l’OCDE, 2019). La crise actuelle a souligné l’importance du rôle des individus qui s’occupent des personnes âgées ainsi que des personnes de santé fragile. En outre, dans de nombreux endroits, les écoles ont fermé, ce qui signifie que les enfants restent à la maison. Ces dynamiques contribuent à augmenter la charge de travail non rémunéré. Il sera probablement très difficile de revenir à la répartition d’avant la crise et presque impossible de parvenir à une répartition équitable du travail domestique non rémunéré entre les hommes et les femmes d’ici 2030.
ODD 5.6 sur la garantie de l’accès aux soins de santé sexuelle et aux droits en matière de procréation: La fourniture de produits de santé sexuelle et reproductive, y compris les protections hygiéniques, pourrait être affectée par la pression exercée sur les chaînes d’approvisionnement (UNFPA, 2020). La crise du Zika en Amérique latine mis en exergue le lien entre les gangs et l’accès des femmes aux soins gynécologiques, les réseaux informels prenant le contrôle de l’accès aux approvisionnements.
Alors que la crise de la Covid-19 se poursuit, la prise de conscience de son impact sur l’accomplissement des objectifs fixés dans l’Agenda 2030. Si les mois passés ont montré qu’il est toujours possible de s’adapter, il est maintenant essentiel de se pencher sur l’impact que les réponses apportées à la crise de la Covid-19 auront sur le développement humain à travers le monde. En tournant notre regard vers l’avenir, il est possible de comprendre que les mesures prises aujourd’hui seront fondamentales pour le futur. Cette prise de conscience s’accompagne de la possibilité d’élaborer des politiques publiques qui tiennent compte des inégalités entre les sexes et qui favorisent des redressements socio-économiques équitables.
Bandiera, O. et al. (2019). “The Economic Lives of Young Women in the Time of Ebola: Lessons from an Empowerment Program”. Impact Evaluation series, No. WPS 8760. World Bank Group, Washington D.C. http://documents.worldbank.org/curated/en/452451551361923106/The-Economic-Lives-of-Young-Women-in-the-Time-of-Ebola-Lessons-from-an-Empowerment-Program.
Equal Measures 2030 (2020). Bending the Curve Towards Gender Equality by 2030. https://www.equalmeasures2030.org/wp-content/uploads/2020/03/EM2030BendingTheCurveReportMarch2020.pdf.
OECD (2020). Women at the Core of the Fight Against COVID-19 Crisis. OECD Publishing, Paris. https://read.oecd-ilibrary.org/view/?ref=127_127000-awfnqj80me&title=Women-at-the-core-of-the-fight-against-COVID-19-crisis.
OECD (2019). SIGI 2019 Global Report: Transforming Challenges into Opportunities, Social Institutions and Gender Index. OECD Publishing, Paris. https://dx.doi.org/10.1787/bc56d212-en.
OECD Development Centre (2019). Gender, Institutions and Development Database (GID-DB) 2019. https://oe.cd/ds/GIDDB2019.
Sochas, L., A. Channon and S. Nam (2017). “Counting indirect crisis-related deaths in the context of a low-resilience health system: the case of maternal and neonatal health during the Ebola epidemic in Sierra Leone”. Vol. 32, pp. 32-39. http://dx.doi.org/10.1093/heapol/czx108.
UNFPA (2020). COVID-19: A Gender Lens – Protecting sexual and reproductive health and rights, and promoting gender equality. UNFPA. https://www.unfpa.org/sites/default/files/resource-pdf/COVID-19_A_Gender_Lens_Guidance_Note.pdf.
Wenham, C., J. Smith and R. Morgan (2020). COVID-19: the gendered impacts of the outbreak, Lancet Publishing Group. http://dx.doi.org/10.1016/S0140-6736(20)30526-2.
United Nations (n.d.). Sustainable Development Goal 5. Retrieved from https://sustainabledevelopment.un.org/sdg5.
United Nations (n.d.). Transforming our world: the 2030 Agenda for Sustainable Development. Retrieved from https://sdgs.un.org/2030agenda.
UN Women (2020). COVID-19 and Violence Against Women and Girls: Addressing the Shadow Pandemic. https://www.unwomen.org/-/media/headquarters/attachments/sections/library/publications/2020/policy-brief-covid-19-and-violence-against-women-and-girls-en.pdf?la=en&vs=5842.
]]>Article proposé et préparé par le Secrétariat de la Fondation des Femmes de l’Euro-Méditerranée
Date de publication: 30 septembre 2019
Au niveau mondial, les femmes sont encore sous-représentées dans les postes de prise de décision et les entités de gouvernance. Par exemple, en février 2019, 24,3% seulement des parlementaires nationaux étaient des femmes [1]. Dans 103 pays et régions, la représentation des femmes dans les entités locales élues variait de moins de 1% à près de la parité, à 50%, avec une médiane de 26% [2]. Alors que les stéréotypes, les rôles et les attentes liés au genre intimident la participation des femmes à la vie politique et publique dans certains pays, la législation et l’absence de politiques sensibles au genre sont considérées comme l’un des principaux défis de la participation politique des femmes. Pour mieux comprendre cette situation, cet article examine le cas particulier du plus petit gouvernorat d’Égypte: Louxor qui compte de nombreuses familles et tribus dont les lignées remontent à l’Égypte ancienne ou des familles arabes qui ont émigré de la péninsule arabique après la conquête musulmane. Les coutumes et les traditions varient d’un village à l’autre mais restent largement similaires, car les habitant-e-s ont souvent à cœur de préserver les systèmes tribaux et les conseils coutumiers, surtout lorsqu’il s’agit de résoudre des problèmes, de régler des différends et de recouvrer des droits. Même si la culture occidentale est répandue dans les zones touristiques où les habitant-e-s interagissent avec les visiteurs étrangers, la population locale reste très conservatrice [3]. L’article est basé sur un diagnostic de terrain mené par l’Association Nationale pour la défense des droits et libertés – ci-après NADRF avec le support Fondation des Femmes de l’Euro- Méditerranée (FFEM) et l’Institut Européen de la Méditerranée (IEMed). Pour réaliser ce diagnostic qui analyse le rôle des femmes et leur participation dans les conseils de gouvernance locale, NADRF s’est appuyé sur des enquêtes et a tenu compte de l’urgence de la situation en raison des élections locales à venir en Égypte, de la corruption généralisée et du manque de reddition de comptes au sein des conseils locaux. La méthodologie visait principalement la nécessité de qualifier et d’autonomiser les femmes, afin qu’elles puissent obtenir une expérience de terrain au sein des conseils. Elle a permis d’offrir une compréhension globale de la situation, de déterminer les principales difficultés et lacunes concernant l’intervention et de mettre en place des activités clés. NADRF a mené le diagnostic en tant que chef de file d’un pôle local d’acteurs de l’égalité femmes-hommes© en Egypte, et a collaboré avec L’initiative en faveur du développement de la culture et de la communauté des femmes du village de Zenia à Louxor, le parlement des jeunes du village de Dair à Louxor et l’Association familiale pour le développement de la société à Louxor. Cette initiative faisait parties des pôles locaux d’acteurs de l’égalité femmes-hommes© que la FFEM a mis en place en Algérie, Égypte, Jordanie, Liban, Maroc, Palestine et Tunisie (1 par pays) pour mobiliser les acteurs de l’égalité au moyen d’activités de collectes de données, de consultations et d’échanges d’expériences dans le but d’analyser des thèmes liés aux droits des femmes et de faire un suivi de l’effectivité des politiques publiques dans ces domaines avec une approche participative. Toutes les informations liées aux résultats des pôles locaux sont disponibles sur www.euromedwomen.foundation et font l’objet d’une vaste diffusion dans la région euro- méditerranéenne.
Les femmes ont joué des rôles clés dans tous les moments historiques de l’Égypte, mais cela ne leur a pas encore permis d’occuper des postes de pouvoir aux côtés des hommes et de prouver ainsi leurs compétences et leurs capacités. Historiquement, les égyptiennes ont été les premières femmes arabes à représenter leur peuple au parlement en 1957. Le 14 juillet 1957, Rawya Ateya, la première parlementaire égyptienne, a pris ses fonctions en tant que députée à part entière pour le gouvernorat de Gizeh, suivie d’Amina Shukri pour Alexandrie. Lors des élections de 1964, les femmes occupaient huit sièges, mais ce nombre est descendu à six en 1967, puis à trois en 1969, pour remonter à huit en 1971. Après la transition vers un système multipartite en 1977 et en réponse aux efforts nationaux et aux initiatives internationales visant à éliminer la discrimination à l’égard des femmes, la loi no 188 adopté en 1979, a instauré un système de quotas en garantissait l’attribution de 30 sièges à l’Assemblée du peuple (360) aux femmes. En effet, le parlement de 1979 a connu une augmentation sans précédent du nombre de députées qui est passé à 35 (30 femmes ont remporté des sièges relevant du quota, trois ont remporté des sièges hors quota et deux ont été nommées par le président), soit 9 % des sièges disponibles [4]. Ce pourcentage est resté à peu près le même en 1984 avec 36 sièges remportés par des femmes. En 1986 la loi no 188 a été abrogée (la Cour constitutionnelle suprême a jugé la loi inconstitutionnelle en 1986 car elle constituait une discrimination fondée sur le genre). De ce fait, la représentation des femmes est tombée considérablement pour atteindre 2,2% dans le Parlement de 1987. Le retour au principe du « gagnant raffle tout » (scrutin majoritaire) en 1990 a entraîné une diminution du nombre de députées qui est passé à 11. En 2005, les femmes n’ont remporté que quatre sièges au parlement sur les 444 disponibles, soit l’équivalent de 0,9 % des sièges. Ces dernières années, l’Égypte a signé de nombreux accords internationaux pour l’autonomisation des femmes, notamment la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) ratifiée en 1981, par l’intermédiaire de laquelle elle s’engageait à modifier certaines de ses lois conformément aux accords internationaux. L’une de ces modifications portait sur la parité dans la vie politique, ce qui a conduit à imposer un quota de 64 sièges pour les femmes. Pour ce qui est de la participation aux conseils locaux, la situation est pire. Or, les dernières élections des conseils locaux de 2008 montre que parmi un total de 51 402 membres des gouvernements locaux, 44 000 ont été élu-e-s par acclamation ou nommés. Environ 5% de ces 44 000 membres non élus étaient des femmes. En fait, depuis 1979, les femmes n’ont jamais représenté plus de 10% d’un organisme gouvernemental local en Égypte. Cependant, l’article 180 de la Constitution de 2014 stipule que les femmes devraient occuper un quart des sièges des gouvernements locaux [5].
Dans les cinq districts du gouvernement de Louxor, les traditions, les coutumes ou même les croyances religieuses apparaissent à plusieurs reprises comme le principal obstacle à la participation dans la vie sociale et politique des femmes, qui dans beaucoup de cas vivent sous le contrôle de leur familles ou tribus. Ces traditions et coutumes sont souvent derrière la manque d’éducation chez les filles, l’augmentation des mariages des enfants ; l’interdiction pour les filles de quitter la maison par crainte d’une agression ; la croyance que l’engagement politique est réservé aux hommes ; idée que les femmes doivent rester à la maison, et la perception négative des femmes par la société, entre autres répercussions néfastes. L’un des plus importants problèmes qui a été abordé concernait les traditions et les coutumes ancestrales qui, dans les régions rurales et dans les villages, surtout dans le sud, n’incitent pas les femmes à quitter leur foyer car elles subissent un contrôle excessif (qui donne lieu à un manque de sensibilisation et d’éducation et à l’isolement des femmes). D’autre part, la perception que les femmes ont d’elles-mêmes demeure un problème constant. Même les femmes éduquées qui sont capables de remettre en cause les traditions se comparent souvent aux hommes. Le rôle des femmes n’est toujours pas reconnu par la société. Par exemple, lorsqu’un homme abandonne sa famille, la femme est félicitée car elle prend soin de ses enfants. Un dicton connu en Égypte souligne cet aspect et désigne les mères comme des femmes d’intérieur et les pères comme des vagabonds. Par ailleurs, et malgré l’existence de lois stipulant leurs droits de participer aux conseils locaux, les femmes ne sont pas formées pour le faire. Même si elles sont éduquées, les femmes disposant de compétences en matière de direction n’ont pas l’expérience nécessaire pour se présenter à des élections aux conseils et ne bénéficient toujours pas du soutien des institutions. Même lorsqu’elles sont pleinement conscientes de leurs droits et obligations, certaines femmes sont passives en ce qui concerne la revendication de leurs droits et leur participation active aux affaires publiques. A Louxor les organisations de la société civile ont été confrontées à un manque de coopération de la part des gouvernements égyptiens successifs. Il est nécessaire d’y remédier afin d’aider les citoyen-ne-s à bénéficier des services offerts par ces organisations.
Former les femmes et leur fournir les connaissances et les outils nécessaires pour s’engager dans la vie politique et publique devraient être une priorité pour l’autonomisation politique des femmes en Égypte. ©NADRF
Afin de favoriser l’accès des femmes aux élections et dans l’exercice du pouvoir locale l’ensemble des entités et personnes impliquées dans le diagnostic mené par NADRF ont proposé plusieurs pistes d’action pour le futur, dont :
Article proposé et préparé par le Secrétariat de la Fondation des Femmes de l’Euro-Méditerranée
Date de publication: 25 février 2019
[toc]Conformément au Fond des Nations unies pour l’enfance (UNICEF), en Palestine très peu d’enfants sont exclus de l’enseignement primaire tandis qu’à l’âge de 15 ans, près de 25% des garçons et 7% des filles ont abandonné leurs études. [1]
Cet article s’intéresse à l’accès à l’enseignement scolaire des filles dans la « Zone C » où la sécurité et les compétences administratives sont sous contrôle israélien depuis les Accords d’Oslo en 1993 [2] et notamment aux facteurs qui conduisent aux absences récurrentes et de façon consécutive à l’abandon scolaire.
L’article s’appuie sur un diagnostic de terrain, dans six localités de la « Zone C » à Bethléem (Al-Meniah, Al-Rashayida, Kisan) et Al Khalil[1] (Al-Bweeb, Ma’en et Zif) [3]. Cette étude a été produite par le Psycho-Social Counselling Center for Women (PSCCW) en collaboration avec la Fondation des Femmes de l’Euro-Méditerranée (FFEM) et l’Institut européen de la Méditerranée (IEMed).
En effet, la FFEM a pour vocation d’analyser au niveau local les réalités des femmes et les politiques publiques qui les concernent à l’aide de consultations et de dialogues de proximité. Pour ce faire, la FFEM met en place annuellement des pôles locaux d’acteurs de l’égalité femmes-hommes en Algérie, Égypte, Jordanie, Liban, Maroc, Palestine et Tunisie (1 par pays). Leur mission est de mobiliser les acteurs de l’égalité au moyen d’activités de collectes de données, de consultations et d’échanges d’expériences dans le but d’analyser des thèmes liés aux droits des femmes et de faire un suivi de l’effectivité des politiques publiques dans ces domaines avec une approche participative.
Toutes les informations liées aux résultats des pôles locaux sont disponibles sur www.euromedwomen.foundation, et font l’objet d’une vaste diffusion dans la région euro-méditerranéenne. En 2018, le PSCCW a été chef de file d’un pôle local d’acteurs de l’égalité femmes-hommes à Bethléem et Al Khalil en Palestine.
Selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (BCAH ou OCHA) les territoires de la « Zone C » constitue plus de 60% de la Cisjordanie avec environ 297,9000 habitant-e-s. [4] Les communautés de cette zone se situent parmi les plus vulnérables des territoires palestiniens occupés en raison des restrictions de l’accès aux terres et aux ressources, de la mobilité et pour la construction et l’aménagement de bâtiments.
Ainsi, les conditions d’accès à l’éducation dans les six villages de la « Zone C » ciblés par le diagnostic de PSCCW [2] partagent une situation analogue, à savoir un manque généralisé d’institutions et un mauvais état des services éducatifs :
manque d’écoles maternelles, salles de classe inadaptées, problèmes d’éclairage, de ventilation et de bruits, carence de moyens de transport entre les différentes localités qui rend l’accès aux établissements d’enseignement difficile. Enfin, l’anxiété et le stress liés à la situation politique et sécuritaire ont aussi des répercussions sur la santé psychologique, en provoquant des problèmes familiaux qui, à leur tour, affectent les capacités d’étude et de concentration des élèves. Les recherches menées par PSCCW dans les communautés ciblées ont montré que l’absentéisme est un phénomène répandu et que la plupart des écoles enregistrent un fort taux d’abandon scolaire et de mauvais résultats scolaires. [5]
A l’entrée de l’école de filles d’Al Karmel on lit : La clé de ma réussite est d’éviter les absences ©PSCCW
D’un autre côté, le système éducatif en Palestine a été historiquement contrôlé par de multiples puissances étrangères et ce n’est qu’en 1994 que l’Autorité Palestinienne a assumé la responsabilité et le contrôle de l’enseignement (cependant, officiellement, les institutions de l’Autorité palestinienne ne sont pas censées couvrir la zone C, ce qui fait que les services de base y font défaut).
Par ailleurs, pendant longtemps le peuple palestinien a considéré l‘éducation comme une stratégie d’adaptation, un moyen de résistance à la marginalisation, en particulier dans les camps de réfugié-e-s mis en place par les Nations Unies. Cependant, la crise politique et économique ajoutée aux conditions de vie et d’éducation instables font que les familles aient d’autres priorités que l’éducation de leurs enfants.
Il faut d’abord signaler la situation politique caractérisée par les restrictions à la circulation ainsi que les démolitions d’immeubles et d’autres infrastructures, les attaques contre les écoles et le harcèlement envers les enseignant-e-s et les élèves par les soldats et colons israéliens, ajouté au manque de sécurité et aux arrestations (95% des nouveaux prisonniers sont des jeunes). Dans ce contexte, les facteurs institutionnels comme le nombre insuffisant de conseillers pédagogiques pour prévenir et gérer les absentéismes et l’abandon scolaire et le manque de ressources pour mettre en place des politiques éducatives de qualité sont des barrières importantes à l’achèvement des études par les filles. [6]
En Palestine 80% des filles complètent leur enseignement secondaire face à 60.5% des garçons. Néanmoins, seulement 19% des femmes ont un emploi contre 71% des hommes [7] de sorte que l’éducation ne remplit pas le rôle de mobilité sociale attendu et que les inégalités femmes-hommes persistent face à l’emploi.
La détérioration de la situation économique provoque de forts taux de chômage et une absence de perspectives d’emploi qui affecte particulièrement les filles et les femmes palestiniennes. [8] Cette précarité a des effets à 2 niveaux : les enfants, comme le reste de la famille, doivent assurer la survie économique et effectuer de nombreuses tâches liées à l’agriculture et l’élevage, ce qui réduit le temps disponible pour les études et contraint souvent les familles à se déplacer (les saisons de récolte de certains légumes et plantes offrent des occasions d’augmenter les revenus, y compris pour couvrir les dépenses scolaires). Par ailleurs, le fait que l’obtention de diplômes soit rarement récompensée par un emploi décourage les familles d’exiger que leurs enfants poursuivent leurs études au-delà du niveau secondaire.
Quant aux aspects culturels et traditionnels, les mariages de mineures, la responsabilité de prendre soin des personnes âgées et handicapées qui incombe aux femmes et les craintes concernant « l’honneur » au cas où les filles seraient attaquées sur le chemin de l’école ou le rejet des classes mixtes sont d’autres facteurs qui limitent les options d’émancipation des filles. [9] Dans ce système patriarcal, il faut aussi noter l’absence de modèles féminins de réussite dans les communautés, les taux de chômage chez les universitaires et les attentes par rapport aux choix d’études et des possibles carrières. Ainsi, le coût des frais d’inscription et l’accès à des universités situées loin du lieu de résidence limitent le choix des spécialités. La plupart des femmes interviewées par PSCCW ont étudié l’enseignement et les rares femmes diplômées qui ont décroché un emploi sont institutrices.
Globalement les possibilités d’éducation chez les filles dans les zones C sont limitées tant pour les filles comme pour les garçons. Le contexte politique et socio-économique, l’occupation israélienne et la baisse du niveau de vie ont un impact sur la qualité de l’enseignement. La crise politique influence particulièrement les communautés vivant dans les zones C qui sont plus marginalisées que les zones voisines (A et B) en ce qui concerne l’accès aux services et aux infrastructures (routes, transports publics…).
Pour pallier à ces obstacles, il est urgent de créer des programmes de prévention de l’abandon scolaire destinés aux élèves et leurs familles, des activités extra scolaires et des programmes d’éducation plus inclusifs pour réintégrer dans le système scolaire les élèves qui l’ont abandonné, des services de rattrapage ainsi que des actions de promotion de toutes les filières, y compris celles scientifiques, pour les étudiant-e-s. En outre, il s’avère nécessaire de renforcer le potentiel des universités locales pour résoudre ces problèmes en offrant des possibilités de formation, sensibilisation et emploi dans les communautés proches des lieux de résidence des étudiant-e-s. Dans ce sens, l’intervention du ministère palestinien de l’éducation et de l’enseignement supérieur pourrait permettre aux diplômé-e-s de trouver des emplois dans les écoles, dispensaires, etc. des communautés de la zone C qui offrent peu de débouchés jusqu’ici.
[1] UNICEF, Middle East and North Africa out-of-school children initiative: State of Palestine fact sheet 2018 (Initiative en faveur des enfants non scolarisés au Moyen-Orient et en Afrique du Nord: fiche sur l’État de Palestine), 2018, http://www.oosci-mena.org/uploads/1/wysiwyg/factsheets/180816_MENA_OOSCI_state_of_Palestine_factsheet_hi-res_.pdf
[2] Peace Agreements & Related, Israeli-Palestinian Interim Agreement on the West Bank and the Gaza Strip (Accords de paix et connexes, accord intérimaire israélo-palestinien sur la Cisjordanie et la bande de Gaza (Oslo I & Oslo II), 1993: https://www.refworld.org/docid/3de5ebbc0.html. 1995: https://www.refworld.org/docid/3de5e96e4.html
[3] PSYCHO-SOCIAL COUNSELLING CENTER FOR WOMEN (PSCCW), Diagnostic de terrain: L’accès a l’éducation des filles dans six localités de la « Zone C » à Bethleem et Al Khalil, FFEM et IEMed, 2018, https://www.euromedwomen.foundation/pg/fr/documents/view/8442/diagnostic-terrain-lacces-a-education-filles-dans-six-localites-zone-c-a-bethleem-al-khalil.
[4] PSCCW. Op. cit., p. 5.
[5] PSCCW. Op. cit., p. 12.
[6] PSCCW. Op. cit., p. 19.
[7] PSCCW. Op. cit., p. 15.
[8] PSCCW. Op. cit., p. 19.
[9] PSCCW. Op. cit., p. 15.
[1] Al Khalil est le nom de la ville d’Hébron en arabe.
[2] PSCCW a collaboré avec l’Université de Bethléem pour entreprendre des recherches de terrain dans six villages de Bethléem et d’Al-Khalil en impliquant le ministère palestinien de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur (directions de l’éducation de Bethléem et d’Al Khalil), les élèves et le personnel des écoles locales et des membres actifs des communautés locales, notamment les chefs des conseils de village et des conseils des pères (lorsque ceux-ci existent) Parmi les principaux outils de collecte de données figuraient des entretiens individuels semi-structurés et des groupes de discussion qui ont permis de mieux comprendre les expériences des filles en matière de scolarisation, et de mettre leurs expériences en lien avec les intérêts des autres agents sociaux impliqués. Entre avril et juin 2018, 30 entretiens et 14 groupes de discussion avec des parents et des élèves ont été organisés dans les six localités (Al-Bweeb, Al-Meniah, Al-Rashayida, Kisan, Ma’en, Zif).
]]>Les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) sont des outils de maniement de l’information comprenant un ensemble varié de produits, d’applications et de services qui sont utilisés pour produire, stocker, traiter, distribuer et échanger l’information. [1] Elles comprennent les « anciennes » TIC que sont la radio, la télévision et le téléphone, et les « nouvelles » TIC que sont les ordinateurs, les satellites et l’Internet. [1]
Les TIC sont accessibles à une population grandissante, particulièrement dans les pays en développement. [2] En 2015, 95% de la population mondiale a accès à un réseau de téléphonie mobile et 40% des personnes dans le monde utilisent Internet. Cependant, il existe des écarts entre les sexes concernant l’accès et l’utilisation de ces technologies. En 2015, au niveau mondial, 46% des hommes contre 41% des femmes sont connectés à Internet. Cet écart est encore plus prononcé dans les pays en développement, où il est de 15,4% en défaveur des femmes, contre seulement 5,4% dans les pays développés. [3] En 2011, au Sénégal, 81,4% des hommes contre 75,3% des femmes ont accès à un téléphone mobile et 87,6% des hommes contre 86,6% des femmes à une télévision. Les disparités en termes de genre sont plus marquées dans l’accès à un ordinateur et à Internet, respectivement de 24,8% pour les hommes et 15,6% pour les femmes. Ces disparités sont moindres lorsque l’utilisation des TIC est exclusive, qu’elle requiert moins de compétences techniques et que son contenu est neutre ou adaptable. [4] Globalement, les études montrent que les femmes ont moins accès à ces technologies, et de fait, les maîtrisent moins bien. Ces disparités d’accès, de contrôle et d’utilisation des hommes et des femmes concernant les TIC sont couramment appelées la « fracture numérique de genre ». [5]
Dans les pays en développement, de nombreux facteurs interviennent dans les disparités de genre comme :
De nombreuses études attestent que l’utilisation des TIC par les femmes permet de renforcer leur autonomie et participe au développement économique et social.
Joëlle Palmieri, « Les femmes non connectées : une identité et des savoirs invisibles » Recherches Féministes (vol. 25, n°27), 2012, http://www.observaction.org/wp-content/uploads/2014/12/Vol25.pdf
Mavic Cabrera-Balleza, Françoise Mukuku, Sylvie Niombo, « Les deux côtés de la même médaille des TIC: Briser le silence sur la violence faite aux femmes et les infractions aux lois sur la protection de la vie privée », GenderIT.org, 2010, http://www.observaction.org/wp-content/uploads/2014/06/A_conversation_with_Sylvie_and_Francoise_on_ICTS.pdf
Union Internationale des Télécommunications, Données et chiffres concernant les TIC, 2013, https://www.itu.int/en/ITU-D/Statistics/Documents/facts/ICTFactsFigures2013-f.pdf
]]>Depuis 2000, la hausse significative de la scolarisation au primaire a profité dans une large mesure aux filles dans de nombreux pays, notamment en Afrique subsaharienne. En 1970, le taux brut de scolarisation au primaire des filles dans cette région était de 44,43%, il atteint 97% en 2013. [1] Selon le dernier Rapport mondial de suivi sur l’Education Pour Tous (EPT), en 2015, 17 pays d’Afrique subsaharienne sur 117 pays dans le monde ont atteint la parité au primaire. Cependant, les progrès enregistrés dans l’élimination des disparités entre les sexes ont été beaucoup moins marqués dans l’enseignement secondaire et supérieur. En Afrique subsaharienne, le nombre moyen de filles scolarisées au secondaire par rapport au nombre de garçons n’a que faiblement progressé depuis 1999, pour s’établir en 2012 à 84 filles pour 100 garçons. [2]
Globalement, le pourcentage d’enfants n’ayant jamais été scolarisés a diminué dans la plupart des pays d’Afrique. Cependant, ce sont toujours les filles les plus pauvres qui ont le moins de chances d’être scolarisées. Au Niger et en Guinée, près de 70 % des filles issues des ménages les plus pauvres ne sont jamais allées à l’école – pourcentage beaucoup plus élevé que chez les garçons – contre moins de 20 % des garçons issus des ménages les plus riches. [2]
Depuis la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, l’éducation constitue un droit fondamental, inscrit dans les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), puis dans les Objectifs de développement durable (ODD) :
En 2015, malgré des progrès indéniables en termes d’accès à l’éducation, la parité filles-garçons n’est toujours pas atteinte en Afrique. [6]
Globalement, les obstacles à la scolarisation des filles sont multiples :
De nombreuses études ont démontré l’impact positif de l’éducation des filles sur la réduction de la pauvreté, de la mortalité infantile et sur la promotion de l’égalité entre les sexes. [12] L’éducation est un facteur clé permettant aux femmes d’exercer des activités rémunératrices, de participer aux revenus du ménage et d’acquérir une autonomie économique et sociale. [7] Ainsi, il est aujourd’hui démontré qu’une fille instruite se mariera plus tard, aura moins d’enfants, se nourrira mieux, aura un emploi mieux rémunéré et participera davantage à la prise de décisions dans le domaine familial, social, économique et politique. La scolarisation des filles a également un effet multiplicateur : ses enfants, à leur tour, auront de meilleures chances d’aller à l’école et d’y rester dans de meilleures conditions. [7]
Selon l’UNICEF, en 2013 au Burkina Faso, parmi les filles âgées de plus de 15 ans, la probabilité d’avoir eu recours au suivi prénatal est de l’ordre de 30% pour celles n’ayant jamais été à l’école contre 45% pour celles ayant complété le cycle secondaire. Au Mali, la probabilité de déclarer une naissance à l’état civil est de 65% pour les mères sans instruction, de 88% pour celles ayant fait l’enseignement primaire et de 98% pour celles ayant achevé le second cycle du secondaire. [13]
De nombreux pays se sont dotés de plans gouvernementaux soutenus par des organisations internationales et non gouvernementales (UNICEF, UNESCO, FAWE, Plan International etc.) destinés à améliorer la scolarisation des filles.
Parmi les stratégies les plus pertinentes, nous pouvons citer :
Ces mesures sont spécifiques à un contexte particulier et n’ont pas le même impact dans tous les pays.
Jeanine Eldred, « Alphabétisation et autonomisation des femmes : histoires réussies et inspirantes », Institut pour l’apprentissage tout au long de la vie (UIL), UNESCO, 2014, http://www.observaction.org/wp-content/uploads/2015/02/alphabetisation-et-autonomisation-des-femmes1.pdf
Unesco, Infographie « Laissées pour compte. L’éducation des filles en Afrique », (consulté le 14/01/16), http://www.uis.unesco.org/_LAYOUTS/UNESCO/no-girl-left-behind/index-fr.html#cover-intro-0
]]>Le conseil d’administration (CA) au sein d’une entreprise est un organe présentant une certaine indépendance par rapport à ses gestionnaires, qui définit la stratégie de l’entreprise et exerce un contrôle sur la gestion de l’entreprise (Les Échos, n.d.).
La représentation des femmes dans les conseils d’administration est un enjeu important, à la fois parce qu’elle est source de compétitivité pour les entreprises qui utilisent ainsi pleinement le capital humain disponible (Commission Européenne, 2015; Catalyst, 2015), mais aussi parce qu’elle permet de faire évoluer les mentalités sur la place des femmes dans les sphères de pouvoir.
Les efforts en vue d’assurer une meilleure représentation des femmes dans les CA font ainsi écho aux Objectifs de Développement Durable (ODD) adoptés par les Nations Unies en 2015. Entre autres cibles, ceux-ci affirment l’importance de « veiller à ce que les femmes participent pleinement et effectivement aux fonctions de direction à tous les niveaux de décision, dans la vie politique, économique et publique, et y accèdent sur un pied d’égalité (ODD 5) ».
D’après plusieurs études, les femmes administratrices considèrent que les stéréotypes et la culture du Old Boys Club restent les barrières les plus importantes à leur accession aux responsabilités au sein de l’entreprise (voir notamment St Onge et Magnan, 2013). Ainsi, les dirigeants/recruteurs peuvent avoir à l’esprit une construction masculine du leadership et ne parviennent pas à imaginer une femme dans des fonctions supérieures (St Onge et Magnan, 2013).
Si les discriminations directes, proscrites par la loi, sont rarement exprimées clairement, les discriminations indirectes jouent un rôle pernicieux. Celles-ci peuvent prendre la forme de critères apparemment neutres, formulés à tous les candidats. Par exemple, la tendance à vouloir pourvoir les postes d’administrateurs avec des candidats qui sont des PDG, alors même que les femmes représentent une infime portion de ces PDGs (St Onge et Magnan, 2013).
Les mentalités commencent néanmoins à évoluer, notamment grâce à une nouvelle génération de femmes PDGs comme Marissa Mayer chez Yahoo ou Indra Nooyi chez Pepsico, qui contribuent à faire émerger des modèles de leadership féminin au sein de l’entreprise.
Afin de renforcer la mixité au sein des conseils d’administration, au moins 9 pays avaient mis en œuvre en 2015 des quotas de femmes pour les entreprises cotées en bourses: l’Allemagne, la Belgique, la France, l’Espagne, l’Islande, l’Inde, Israël, l’Italie et la Norvège. Les quotas variaient d’un pays à l’autre, allant de 20% en France jusqu’à 40% en Islande. En Israël et en Inde, les entreprises cotées en bourse devaient avoir au moins une femme au sein de leurs conseils d’administration (Banque mondiale, 2016).
L’Union Européenne examine actuellement un projet de directive visant à encourager ses États membres à garantir une représentation des femmes dans les conseils d’administration d’au moins 40% (Commission européenne, 2015).
Les quotas inscrits dans la législation semblent porter leurs fruits. Les pays de l’Union Européenne ayant enregistré la plus forte hausse de femmes dans les CA ces dernières années sont aussi ceux qui ont pris des mesures législatives ou lancé un débat public d’envergure sur le sujet : en Italie, la proportion de femmes dans les CA a ainsi augmenté de 21,2% et de 20,5% en France entre 2010 et 2015 (Commission européenne, 2015).
La promotion des femmes au sein des instances de décision des entreprises peut être réalisée non seulement par des mesures législatives appropriées (comme par exemple l’instauration de quotas) mais aussi en impliquant étroitement le monde de l’entreprise et la société civile (BAD, 2015).
Des initiatives dans ce sens existent déjà, par exemple le réseau Catalyst Corporate Board Resource, soutenu par des grandes entreprises telles que General Motors, donne la possibilité aux PDG membres de sponsoriser les femmes qualifiées pour siéger en CA. Un répertoire de femmes candidates pour ce type de postes et recommandées par les PDGs du réseau est également proposé aux membres (Catalyst, n.d).
Une étude récente portant plus spécifiquement sur le continent africain recommande notamment :
Banque Africaine de Développement (2015), Where Are the Women: Inclusive Boardrooms in Africa’s top listed companies? http://www.afdb.org/fileadmin/uploads/afdb/Documents/Publications/Where_are_the_Women_Inclusive_Boardrooms_in_Africa%E2%80%99s_top-listed_companies.pdf
Banque Interaméricaine de Développement (2016), “Female Corporate Leadership in Latin America and the Caribbean Region: Representation and Firm-Level Outcomes”, IDB working paper series Nº IDB-WP-655, https://publications.iadb.org/bitstream/handle/11319/7386/Female-Corporate-Leadership-in-Latin-America-and-the-Caribbean-Region-Representation-and-Firm-Level-Outcomes.pdf?sequence=1
Banque Mondiale (2015), Women, Business and the Law 2016 : Getting to Equal, http://wbl.worldbank.org/~/media/WBG/WBL/Documents/Reports/2016/Women-Business-and-the-Law-2016.pdf
Bloomberg (2016), « Women on Boards », Bloomberg Quick Take, http://www.bloombergview.com/quicktake/women-boards
Catalyst (2015), Companies Behaving Responsibly: Gender Diversity On Boards, http://www.catalyst.org/knowledge/companies-behaving-responsibly-gender-diversity-boards
Commission Européenne (2015), Gender balance on corporate boards > Europe is cracking the glass ceiling, http://ec.europa.eu/justice/gender-equality/files/womenonboards/factsheet_women_on_boards_web_2015-10_en.pdf
Korn Ferry Institute (2015), Diversity Matters : Adding Colour to Boards in APAC, http://www.kornferry.com/institute/diversity-matters-adding-colour-boards-apac
Les Echos (n.d), « Conseil d’administration ou de surveillance et direction”, léxique financier consulté le 18 mars 2016, www.lesechos.fr/finance-marches/vernimmen/definition_conseil-dadministration-ou-de-surveillance-et-direction.html?OgkEzOk2jwjIVtDG.99
St-Onge, S. et Magnan, M. (2013), « Les femmes au sein des conseils d’administration: bilan des connaissances et voies de recherche futures », Finance Contrôle Stratégie, http://fcs.revues.org/1292
Crédit Suisse, European Diversity Quotas : we need another 400 women directors, https://www.credit-suisse.com/media/production/articles/news-and-expertise/docs/2015/06/diveristy-on-board/european-diversity-quotas.pdf
IFC (2015), Women on Boards: A Conversation with Male Directors, Focus 9, http://www.ifc.org/wps/wcm/connect/b51198804b07d3b2acabad77fcc2938e/Focus9_Women_on_Boards.pdf?MOD=AJPERES
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Dans les pays de l’OCDE, les femmes sont désormais plus nombreuses que les hommes dans l’enseignement supérieur. En 2012, 58% des diplômes universitaires étaient ainsi obtenus par des femmes (OCDE, 2015).
Les progrès des femmes et des filles en matière d’éducation masquent néanmoins d’autres types d’écarts entre les sexes : les filles sont en effet beaucoup moins susceptibles que les garçons de choisir les filières scientifiques, technologiques, de l’ingénierie et des mathématiques (STIM), diplômes qui sont pourtant les plus demandés sur le marché du travail. De leur côté, les garçons sont sous-représentés dans les filières de la santé et de l’enseignement (OCDE, 2015 ; OCDE, 2012).
Le phénomène semble également exister dans de nombreuses régions en développement, malgré la persistance de disparités entre femmes et hommes dans l’accès à l’enseignement supérieur (OCDE, 2012).
C’est cette tendance des femmes et des hommes à choisir des orientations différenciées et parfois inégalement valorisées qu’on désigne par les termes de « ségrégation dans les filières d’éducation ».
La ségrégation éducative pose problème car elle se transforme par la suite en ségrégation professionnelle, qui pèse lourdement sur les opportunités d’emploi des femmes, diminue leur potentiel de rémunération et induit une sous-utilisation de capital humain (OCDE, 2012).
Au delà des arguments économiques, l’enjeu est d’offrir à chacun la possibilité de choisir librement une orientation professionnelle correspondant à ses aspirations et compétences, sans être influencé par la pression sociale et les stéréotypes de genre (OCDE, 2015).
Selon des études récentes, les femmes sont sous-représentées dans toutes les filières STIM, mais plus particulièrement dans l’ingénierie et l’informatique, secteurs pourtant porteurs sur le marché de l’emploi. Ainsi en 2012, seuls 20% des diplômés en informatique étaient des femmes – contre 23% en l’an 2000. En revanche, plus de 70% des diplômés des sciences de la santé et de l’éducation étaient des femmes (OCDE, 2015 ; OCDE, 2014).
Après leurs études, les femmes diplômées des filières STIM ne sont que 43% à faire carrière dans ces domaines, contre 71% pour les hommes détenteurs des mêmes diplômes (OCDE, 2015).
Des tendances semblables se retrouvent dans de nombreux pays en développement. Ainsi dans la région Afrique du Nord et Moyen-Orient, les femmes représentent moins d’un tiers des étudiants dans l’ingénierie, la production et le bâtiment, tandis que les filières sanitaires et sociales sont majoritairement féminines, à l’exception de la Jordanie et de l’Arabie Saoudite (UNESCO, 2010 ; OCDE, 2012).
Certains pays font toutefois figure d’exception, comme l’Indonésie où il n’y a quasiment pas de différences entre femmes et hommes dans le choix des filières d’éducation supérieure (OCDE, 2012).
Tout au long de leur scolarité, les filles obtiennent de meilleurs résultats en lecture que les garçons. Il n’y a pas de différence significative en mathématiques en primaire, mais l’écart se creuse en général à l’avantage des garçons dans cette matière à partir du secondaire (OCDE, 2015, à partir de l’enquête PISA 2012).
Les écarts de performance dans les différentes matières n’expliquent cependant qu’en partie l’ampleur de la ségrégation éducative: même les filles qui obtiennent d’excellents résultats en mathématiques et en sciences ne sont pas plus susceptibles que les autres de s’orienter ensuite vers l’informatique ou l’ingénierie. Les différences dans les choix d’orientation s’expliquent donc d’avantage par les attitudes des élèves, leurs motivations et leurs centres d’intérêt, que par des différences d’aptitudes. Les stéréotypes femmes-hommes dans ces domaines apparaissent très tôt, dans les familles comme à l’école (OCDE, 2015 ; OCDE, 2012).
Certaines études soulignent par ailleurs que les « choix » d’orientation féminins seraient en réalité conditionnés par les contraintes anticipées par les jeunes femmes quant à la prise en charge des enfants et les options d’emploi qui leurs seront accessibles par la suite (Commission Européenne, 2014 ; OCDE, 2012).
La ségrégation dans les filières d’éducation peut être surmontée par des efforts conjoints des pouvoirs publics, des parents et des enseignants pour :
Commission Européenne (2014), A New Method to Understand Occupational Gender Segregation in European Labour Markets. Luxembourg: Bureau des publications de l’Union Européenne, http://ec.europa.eu/justice/gender-equality/files/documents/150119_segregation_report_web_en.pdf
OCDE (2015), Trends Shaping Education 2015, Spotlight 7: Gender Equality, http://www.oecd.org/edu/ceri/Spotlight7-GenderEquality.pdf
OCDE (2014), Education at a Glance 2014: OECD Indicators, Editions de l’OCDE Paris, http://dx.doi.org/10.1787/eag-2014-en
OCDE (2012), « L’égalité hommes-femmes dans l’éducation », in OECD, Inégalités hommes-femmes: Il est temps d’agir, Editions de l’OCDE Paris, http://dx.doi.org/10.1787/9789264179660-4-fr
UNESCO (2010), Rapport mondial de suivi sur l’éducation pour tous : atteindre les marginalisés, Editions UNESCO, Paris, http://unesdoc.unesco.org/images/0018/001875/187513F.pdf
OECD (2015), « Comment expliquer l’inégalité entre les sexes dans l’éducation? », PISA à la loupe, No. 49, Editions de l’OCDE Paris, http://dx.doi.org/10.1787/5js4xffc0pbr-fr
OECD (2015), « What some countries are doing to promote gender equality in education », in OECD, The ABC of Gender Equality in Education: Aptitude, Behaviour, Confidence, OECD Publishing, Paris.
DOI: http://dx.doi.org/10.1787/9789264229945-10-en
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